Le congrès de la Société Américaine d’Hématologie (ASH) qui s’est tenu à San Diego en décembre 2016 a apporté d’importantes confirmations concernant les traitements des hémopathies malignes.

Quand l’immunothérapie s’installe

C’est le cas notamment de l’immunothérapie utilisant les anticorps anti-PD1 dans le traitement des lymphomes de Hodgkin. En effet, il semble maintenant acquis que les deux anticorps nivolumab et pembrolizumab soient particulièrement actifs dans ce type particulier de lymphome. Les études, avec un suivi plus important, montrent que l’effet de ces anticorps est prolongé. Que cela soit pour l’étude CheckMate 205 [1] avec le nivolumab ou avec l’étude Keynote 013 [2, 3] avec le pembrolizumab, les durées médianes de survie globale ne sont toujours pas connues avec des suivis supérieurs à 1 an et des réponses maintenues dans la majorité des patients inclus dans les essais. L’obtention de la réponse semble rapide dans les deux cas (< 3 mois). Par ailleurs, une étude particulièrement intéressante dans les lymphomes primitifs du médiastin a montré un taux de réponse et une durée de réponse là aussi importants chez des patients en échec de traitement conventionnel avec le pembrolizumab. Parmi les 17 patient traités, 7 (41%) ont obtenus une réponse au traitement [4].

Concernant l’immunothérapie par thérapie cellulaire, les CAR T-cells ont une activité maintenant bien connue dans les leucémies aiguës lymphoïdes (LAL). Une étude importante a été rapportée dans les LAL de l’enfant (étude ELIANA) avec le CTL019 [5]. Un traitement par fludarabine et cyclophosphamide était pratiqué avant l’infusion des CAR T-cells comme cela est habituellement le cas. Le taux de réponse dans cette analyse intermédiaire portant sur 50 patients est de 82% avec 89% des patients en vie à 6 mois. Des résultats plus matures dans les lymphomes, les myélomes et les leucémies lymphoïdes chroniques (LLC) sont attendus. Enfin, l’intérêt du lenalidomide, drogue immunomodulatrice, dans les lymphomes diffus à grandes cellules B (DLBCL) n’a pas été franchement validé au vu des résultats troublants de l’étude REMARC [7] qui évaluait le rôle éventuel du lénalidomide en maintenance dans les lymphomes diffus à grandes cellules B (DLBCL) après une induction de type R-CHOP. Bien que le traitement de maintenance chez les patients en réponse au R-CHOP ait un effet bénéfique sur la survie sans progression, il n’a pas été observé de bénéfice sur la survie globale. La place du lénalidomide en maintenance dans les lymphomes B à grandes cellules reste donc difficile à affirmer.

Les anticorps monoclonaux anciens et nouveaux dans les hémopathies lymphoïdes

Dans les lymphomes du manteau, l’essai LyMa [6] a montré que le rituximab en maintenance avait un effet sur la survie globale des patients traités par une induction à base de cytarabine suivie d’une intensification de type R-BEAM. Cet effet a été mis en évidence lors de l’analyse finale de cet essai et pourrait avoir un impact sur la prise en charge de ces patients. Il est à noter que le même résultat avait déjà été observé chez les patients plus âgés ne pouvant bénéficier d’une greffe de moelle. Ces deux études montrent que le traitement de maintenance par rituximab améliore le pronostic des patients avec un lymphome du manteau.

Dans les DLBCL, l’étude GOYA [8] qui évaluait de manière comparative le CHOP + rituximab ou GA101 n’a pas montré de bénéfice pour le bras GA101 dans les lymphomes B à grandes cellules. Ce résultat négatif marque aussi une étape importante dans le développement du GA101 en hématologie. En revanche, l’étude GALLIUM [9] portant sur 1202 patients avec lymphome folliculaire en première ligne de traitement a montré des résultats beaucoup plus encourageants pour le GA101, ce nouvel anticorps anti CD20. Le schéma de l’essai était classique avec une induction de chimiothérapie en association soit avec du rituximab, soit avec du GA101 suivi d’une maintenance en cas de réponse à l’induction par GA101 ou rituximab. L’anticorps utilisé avec la chimiothérapie était celui utilisé en maintenance (pas de « cross over »). Les conclusions actuelles sont une amélioration de la survie sans progression en faveur du bras avec GA101 en induction et en maintenance.

Concernant les myélomes multiples, l’étude de phase III StaMINA [12] a comparé une intensification simple, une intensification suivie d’une consolidation par RVD ou une double intensification chez 758 patients. Le critère principal d’évaluation était la survie sans progression à 38 mois. Il n’a pas été observé de différence sur ce critère principal entre les 3 bras. La combinaison de daratumumab a aussi été montrée bénéfique en combinaison avec Rd ou Vd en terme de qualité de réponse (obtention rapide et durable d’une réponse avec MRD négative) [13].

Inhibition de Bcl-2, une stratégie prometteuse dans les pathologies lymphoïdes, mais aussi myéloïdes

Pour les LLC, des résultats assez intéressants ont été rapportés avec le venetoclax chez des patients en échec d’ibrutinib (43 patients) ou d’idelalisib (21 patients). Le taux de réponse est de 70% après ibrutinib et 62% après idelalisib. Le suivi est encore court mais les réponses semblent se maintenir (survie sans progression estimée de 80% à 12 mois) [10]. Par ailleurs dans la pathologie myéloïde, une étude particulièrement intéressante a été rapportée avec la combinaison de venetoclax associé à l’aracytine à faible dose chez les sujets âgés traités pour une leucémie aiguë myéloïde (LAM) en première ligne de traitement. Le taux de réponse globale observé est de 61%, avec 54% de RC ou RC incomplète [11]. L’ensemble de ces données confirme bien ce qui avait été déjà observé dans certaines indications (traitement par anti-PD1 et lymphome de Hodgkin, CAR T-cell et LAL) et montre de nouvelles pistes particulièrement intéressantes comme l’association de venetoclax et aracytine dans les LAM du sujet âgé, ou le venetoclax seul dans les LLC déjà traitées par ibrutinib ou idelalisib.

Dr Vincent Ribrag

Références:

[1] Timmerman et al., abstract 1110

[2] Armand et al., abstract 1108

[3] Moskowitz et al., abstract 1107

[4] Zinzani et al., abstract 619

[5] Grupp et al., abstract 221

[6] Le Gouill et al., abstract 145

[7] Thieblemont et al., abstract 471

[8] Vitollo et al., abstract 470

[9] Marcus et al., abstract 6

[10] Jones et al., abstract 639

[11] Wei et al., abstract 102

[12] Stadtmauer et al., abstract LBA-1

[13] Avet-Loiseau et al., abstract 246